Un rhinocéros… ça en fait de la poussière !
Article paru dans les Cahiers Jungiens de Psychanalyse, juin 2008, n°126 : L’ANIMAL EN SOI
http://www.cairn.info/revue-cahiers-jungiens-de psychanalyse.htm
Début de l’article :
« J’ai fait, il y a longtemps déjà, l’expérience du fanatisme […] C’était terrible […], le fanatisme défigure les gens […] les déshumanise. J’avais l’impression physique que j’avais affaire à des êtres qui n’étaient plus humains, qu’il n’était plus possible de s’entendre avec eux […] j’ai eu l’idée de peindre sous les traits d’un animal ces hommes déchus dans l’animalité, ces bonnes fois abusées, ces mauvaises fois qui abusent ».
Ionesco choisit Rhinocéros, « féroce, brutal, obtus » pour figurer l’homme métamorphosé par l’idéologie. Dans sa pièce tous les personnages sauf un, Bérenger, succomberont à la « rhinocérite ».
Fin l’article :
Cette dose de conscience animale où le corps et ce qui l’affecte est au centre, instille une mesure de subjectivité et de sensibilité à la vie au présent qui entre en résonance avec la part de ce qui dans le réel concerne vraiment. L’écho que j’y trouve confère au monde un sens premier qui me regarde, me mobilise, fonde ma raison d’être et découpe dans ce qui se propose ce qui me convient avant tout. La conscience de cette niche qui colle à la peau permet de choisir dans ce qui se propose ce qui va comme un gant, et laisser de côté ce qui est trop grand.
Résumé :
L’analyse de la pièce de Ionesco « Rhinocéros » est l’occasion de souligner l’importance pour le complexe moi de rester solidement implanté dans une forme de conscience animale nommée « estimative » qui lui donne la subjectivité nécessaire pour se tenir à distance des positions normées et/ou idéologiques des temps qui courent ou de notre type psychologique. De surcroît, l’estimative confère un instinct, celui de reconnaître dans ce qui passe dans notre champ de perception, ce qui concerne vraiment.
Vous pouvez lire l’article sur le site :
TRANSPORT DES SENS
Conférence le 28 janvier 2008 dans le cadre de la journée des Cahiers Jungiens de Psychanalyse sur thème : LES PORTES DE LA SENSATION
Extrait :
Le philosophe Persan Avicenne ayant étudié le psychisme des animaux avait appelé « estimative » leur à saisir dans chaque situation concrète « ce qui se rapporte se rapporte à leur bien », ce qui leur est utile , agréable , nuisible ou dangereux. Ainsi les animaux « estiment » le bon et le mauvais mais ils ne l’évaluent pas en soi comme nous le faisons, ils l’évaluent par rapport à leur existence propre et à celle de leur espèce. L’homme commence par se demander » qu’est ce que c’est » ?, » qu’en dire » ? Pour nous le langage est une question plus qu’un acquis ou un outil. Nous avons la capacité de dire les choses, de faire exister un monde de significations. L’animal au contraire ne se dit rien, il réagit, il s’adapte à ce qui l’environne. L’animal ne s’interroge pas sur le milieu où il vit, il se contente de le vivre. Tandis que l’homme se décentre et se projette, l’animal, lui, vit dans un cercle. Le milieu et le comportement forment ce cercle qui impose « le sens du monde » propre à chaque espèce animale. C’est à l’intérieur de ce cercle, et à l’intérieur seulement qu’on peut parler de conscience animale.
Dans la mesure où il sait être connecté à cette estimative, l’homme garde la capacité à ne pas perdre de vue son bien, à ne pas aller au-delà de ses forces, de ce qu’il peut accepter ou supporter, à mettre des limites aux risques d’ingérence dans sa sphère personnelle.
La conscience animale donne une subjectivité incontournable, laquelle permet de conserver un certain quant à soi.